mercredi 2 octobre 2013

Méditation sur Jérémie 31 (versets 1-6, 10-14 et 31-34)


Contexte : cette méditation – à deux voix – a été partagée dans le cadre d'un culte où on a apporté les échos d'un camp organisé quelques semaines auparavant ; il s'agissait d'un camp intergénérationnel.

(Julie)

« Jeunes et vieux se réjouiront ensemble, » nous dit Jérémie. « Ils affluent vers les biens du Seigneur, vers le blé, le moût et l’huile fraîche, vers le petit et le gros bétail. Ils se sentent revivre comme un jardin bien arrosé ». Se réjouir ensemble de la générosité d’un Dieu qui nous comble de ses biens, c’est certainement ce que nous avons fait lors de ces quelques jours. Je garde le souvenir de ces moments simples où nous nous sommes retrouvés dans le plaisir que donne un bouquet de fleurs fraîches harmonieusement disposées, un bon repas partagé dans l’amitié, une marche sous la pluie dans une forêt de hêtres parfois traversée d’un rayon de soleil, une histoire racontée au coin du feu de camp qui émerveille petits et grands.

Mais, dans la Bible comme dans notre vie, se réjouir des choses simples ne va pas toujours de soi. Dans le livre de Jérémie, les paroles que nous avons entendues sont une sorte de pause lumineuse dans un discours bien sombre. Désolation, ruine, malédiction : ce n’est pas pour rien qu’en français, la plainte est parfois appelée « jérémiade » ! L’histoire que raconte Jérémie semble traversée par le ressentiment. Dieu s’est senti délaissé par Israël ; Israël s’est senti abandonné par Dieu ; la rancœur à l’égard de l’autre, et parfois de soi-même, engendre violence et sentiment de culpabilité. Ce sont des situations que, je crois, nous connaissons tous : dans nos couples, dans nos amitiés, au travail ou dans notre vie d’église...

Heureusement, nous dit Jérémie, dans notre chemin avec Dieu, ces situations sont appelées à disparaître. Dieu propose un nouveau départ que Jérémie appelle la nouvelle alliance : « Je déposerai mes directives au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être ; je deviendrai un Dieu pour eux, et eux, ils deviendront un peuple pour moi » (31,33). Lorsque nous avons médité ce texte ensemble, un autre mot s’est imposé pour dire la même chose : celui de « confiance ». Jérémie nous invite à faire, à refaire confiance à Dieu au-delà des difficultés, comme Dieu nous fait et nous refait confiance sans relâche. Nous avons beaucoup parlé, autour de ce texte, du rapport aux enfants. Tous les parents présents ont dit deux choses essentielles : leur soutien inconditionnel à leurs enfants, et leur fierté de les voir grandir dans la confiance pour devenir, peu à peu, des partenaires. Dans la nouvelle alliance, Dieu nous donne son soutien inconditionnel ; il nous appelle à grandir dans la confiance et à devenir ses partenaires de celles et ceux qu’il nous donnes comme sœurs et frères. C’est un appel pour l’avenir, mais c’est aussi et déjà une réalité dont nous avons pu constater, pendant trois jours, qu’elle est bien présente et qu’elle est bonne.

(Hyonou)

« Un appel pour l’avenir mais déjà une réalité », vient de dire Julie. Cela me rappelle une question qui a surgi pendant la méditation du texte dans mon groupe : la promesse de Dieu décrite dans la prophétie de Jérémie, où en est-elle ? Elle parle du rassemblement de toutes les familles d’Israël marchant vers un avenir de fête, de l’épanouissement de tous, jeunes et vieux, de la transformation du deuil en joie, de la connaissance de Dieu inscrite dans le cœur de chacun, petits et grands. L’un des participants de mon groupe nous a fait remarquer que le sort du pays d’Israël aujourd’hui ne correspondait pas complètement à cette image d’un peuple renouvelé et rendu fidèle à Dieu ; un autre, que cette image ne correspondait pas au peuple chrétien non plus, qui marche à la suite du peuple d’Israël comme un messager parmi les peuples de toute la création.

La prophétie de Jérémie nous semble en effet décrire une facette de ce que nous espérons et attendons : le royaume de Dieu, ou le règne de Dieu. La « nouvelle alliance » qu’elle annonce ne signifie pas un simple renouvellement de l’alliance jadis conclue et, par malheur, brisée à un moment donnée, à l’instar d’un contrat de travail ou d’assurance qu’on signe ou qu’on annule selon les circonstances. Cette alliance est nouvelle car elle est la promesse d’une transformation radicale, qui arrivera à la fin des temps, de ce qu’on comprend, devine ou imagine concernant la relation entre Dieu et nous.

Quelles sont vos images du royaume de Dieu ? A votre avis, selon votre foi, comment iront les choses dans le royaume de Dieu à la fin des temps ? Un royaume de paix ? de justice ? de vie ? d’amour ? d’une vraie humanité ? Oui, sans doute, tout cela. Mais l’ennui, c’est que nos conceptions de paix, de justice, d’amour, d’humanité, sont multiples et divergent souvent, au point que nous provoquons même la violence au nom de la paix, l’iniquité au nom de la justice, la souffrance au nom de l’amour… Nous ne sommes pas encore dans le royaume de Dieu.

Mais nous devons affirmer en même temps que nous sommes déjà dans le royaume de Dieu. Nous sommes celles et ceux qui reconnaissent comme notre Seigneur celui qui a montré, par sa vie, sa mort et sa résurrection, que c’est Dieu qui règne dès ici bas, dès maintenant. De ce point de vue, l’Église n’existe pas seulement pour faire quelque chose pour le royaume de Dieu à venir, mais elle est là aussi – peut-être avant tout – pour le vivre. Ce que nous vivons comme joie, justice ou paix est l’avant-goût, le reflet du royaume de Dieu. L’Église est le rassemblement de celles et ceux qui espèrent quelque chose d’inimaginable à partir de cet avant-goût qui advient dans notre vie. Pendant le camp à Prêles, jeunes et vieux, en riant ensemble, je crois que nous avons vécu le signe du royaume à venir décrit par Jérémie. Petits et grands, en accueillant mutuellement, nous sommes appelés à être témoins de la fête à venir les uns pour les autres.

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